Hi Eric,
Je pense qu'un expert pourrait juste nous dire ce qu'il faut observer sans expliquer en détail le pourquoi..
Baisse de la pression atmo, nuage de tel couleur.. etc..
Par exemple, en été, nous avons ici les AM un thermique de Nord-Ouest qui lève vers 14H00 à env 15/20nds.. quel éventuel indicateur va me permettre de savoir si il sera fort ou pas?
J'espère que je suis assez clair...
Slts
Dans le cas du thermique, et pour faire simple... autant que possible...
L'origine des brises, qu'elles soit de mer, de terre ou, en montagne, de vallée, c'est un contraste thermique.
La source principale de chauffage sur Terre, c'est le rayonnement solaire. Il apparaît faiblement au lever du soleil (soleil à l'horizontale), puis va croître jusqu'au zénith (passage au méridien), puis décroître jusqu'au coucher du soleil. Il sera nul la nuit.
Or, la mer et le sol ne régissent pas de la même manière au rayonnement du soleil. Ceux qui fréquentent les Calanques l'été savent qu'en plein cagnard, il est aussi difficile de marcher pieds nus sur les rochers tellement ils sont chauds, que de mettre un bout d'orteil dans l'eau tellement elle est
froide fraîche (y a des Bretons qui lisent j'espère). Le sol se réchauffe plus vite et présente une amplitude thermique (différence entre la température maximale et minimale, typiquement 15°C l'été) plus importante que l'eau toute proche (quasiment constante dès qu'on n'a plus pied).
En gros, il faut retenir que la température minimale est observée 1/2 heure après le lever du soleil, et la température maximale environ deux heures après le passage du soleil au zénith (environ 16 heures l'été, mais un peu plus sur la côte atlantique : longitude W). Pour ceux qui veulent briller en société, cette évolution qu'on appelle diurne s'appelle également variation nycthémérale. On veillera toutefois à ne pas confondre avec NTM, ça n'a rien à voir.
Alors pourquoi cette différence de température est importante dans notre affaire ?
Parce que nous sommes en présence d'un gaz, l'air plus ou moins humide de l'atmosphère, et que ce gaz est en contact d'une source froide (la mer en journée) et d'une source chaude (la terre en journée). Bref, on a presque tout pour faire un moteur en thermodynamique. Ce moteur va déplacer l'air : c'est ce qu'on appelle le vent.
Alors comment cela se passe ?
Tout d'abord le sol chaud va transférer de la chaleur à l'air qui vient à son contact. En chauffant, l'air - qui est un gaz - va se dilater (comme les boudins des pneus en plein soleil). Imaginons donc un petit cube d'air d'1 cm de côté. En se réchauffant, il va se dilater et mesurer disons 1,1 cm de côté.Son poids restant le même (on n'a pas ajouté d'air avec une pompe, on a juste chauffé !), le volume augmentant, sa densité baisse. Il se retrouve en dessous d'un autre petit cube qui n'a pas été réchauffé par le sol qui est donc plus dense. Archimède va s'assurer que le cube plus dense descende et le cube moins dense monte... et il va monter, monter, monter.... jusqu'au bout, puisque tous les petits cubes qui sont au-dessus de lui sont plus froids ? Pas tout à fait. D'une part, il peut arriver que de l'air chaud soit au-dessus d'un air plus froid (inversion de température, typique des matins d'hiver), auquel cas notre petit volume d'air arrêtera son ascension. D'autre part, en montant, la pression de notre petit cube va diminuer, et en supposant qu'il n'échange pas de chaleur avec ses voisins (ce qui est une bonne approximation), son volume et donc sa densité vont diminuer : son ascension s'arrêtera quand il aura trouvé des voisins de même densité.
Donc le premier mouvement, c'est l'ascension créée par la source chaude.
J'ai parlé d'un petit cube qui montait. Mais en fait ce sont des milliards de petits cubes qui montent. C'est comme si on branchait un aspirateur au-dessus du sol chaud. Vous me voyez venir avec mes gros sabots : qui dit aspirateur dit dépression. Eh oui, le réchauffement du sol vient de créer une dépression, exactement comme celles dont nous parlent les miss météo à la télé. OK elles sont plus petites, et vous ne regarderez sans doute pas mes jambes velues comme vous regardez les gambettes de ces demoiselles, mais ça n'en reste pas moins des dépressions.
Le deuxième mouvement, c'est à la peur du vide qu'on le doit.
En montant, les petits cubes laissent un trou. Comme il faut bien respirer, le trou aspire de l'air sur le côté, notamment sur la mer. Il se met en place une circulation horizontale, entre ce qui est un anticyclone (la mer, froide) et la dépression (notre sol chaud). Ce qui est remarquable dans notre situation, c'est qu'au début le vent va être perpendiculaire à la côte, c'est à dire qu'il va aller dans le sens centre de l'anticyclone vers le centre de la dépression. C'est remarquable, car les miss gambettes de la télé nous montrent toujours un vent qui tourne dans le sens des aiguilles d'une montre autour de l'anticyclone, et dans le sens inverse pour les dépressions. C'est la faute à Coriolis et à la terre qui tourne.
A cause de Galilée, la Terre tourne (souvenez-vous, "et pourtant, elle tourne..."). Elle tourne dans le sens des aiguilles d'une montre, tant et si bien que la rotation a une fâcheuse tendance à dévier vers la droite tout ce qui bouge dans l'hémisphère nord (vers la gauche dans le sud). Si vous ne me croyez pas, tirez un missile vers l'Angleterre, et allez vite vous excuser auprès de nos amis belges...(ou vous pouvez aller au Palais de la découverte à Paris, il y a une expérience plus pacifique et très sympa là-dessus sur un manège). Cette déviation est due à une force inertielle (c'est à dire une pseudo-force issue d'un calcul mathématique) qui porte le nom de Coriolis, du nom d'un brillant polytechnicien (ça devait tourner rond dans sa tête) qui a fait le calcul, sur lequel transpirent encore des générations d'aspirants polytechniciens.
Ce qui est vrai pour un missile l'est également pour nos petits volumes d'air entre un anticyclone et une dépression. En allant vers la dépression, l'air tourne vers la droite. Il s'enroule donc autour de l'anticyclone dans le sens horaire, et anti-horaire autour de la dépression.
L'intensité de cette force augmente avec la masse de petit cube d'air et sa vitesse.
En milieu de matinée, quand ça commence juste à chauffer, l'aspirateur marche doucement, les particule ne se déplacent pas très vite. Coriolis est au repos, le vent est perpendiculaire à la côte. Après quelques heures, la plage est bien chaude, l'eau presque tiède, le vent s'intensifie un peu, le vent commence à tourner vers la droite. En plein après midi, c'est super chaud sur la plage, l'eau paraît d'autant plus fraîche, le sable vole sur la plage et s'oriente non pas parallèlement à la plage, mais forme un angle compris entre 45 et 30 degrés avec la côte. Puis l'heure de l'apéro arrivant, l'aspirateur se calme progressivement et le vent tourne dans l'autre sens.
c'est ce que Gilles décrit quand il parle d'un vent de NW sur une côte orientée NNW/SSE, et qui fait qu'on monte sur Port Joviale tôt le matin et qu'on revient vers le sud dans l'après midi (outre le fait qu'arriver l'après midi à POrt Joinville l'été, ... comment dire...)
Ce vent s'ajoute au vent synoptique, c'est à dire au vent des miss gambettes déterminés par le champ dépression à l'échelle de la planète... tant qu'il n'est pas trop fort, j'y reviens tout de suite. Donc si le vent annoncé sur le bulletin météo vient de la mer, le thermique sera renforcé, s'il vient de la terre, il sera plus faible.
En résumé, le soleil met en marche un moteur thermique qui génère un vent. L'intensité de ce vent dépendra de l'intensité de l'aspirateur, qui dépend en premier lieu de la variation nycthémérale (vous réussirez aussi à le placer). Plus il va faire chaud, plus il y aura de vent. Au bémol près que s'il y a beaucoup de vent synoptique, les particules d'air resteront moins longtemps en contact avec le sol chaud, le transfert thermique sera moins efficace, voire pas du tout et le thermique ne déclenchera pas (mais ç ne change rien, il y aura quand même du vent !).
L'intensité de l'aspiration dépend également de la hauteur à laquelle les particules d'air sont transportées. Plus c'est haut, plus la dépression sera importante. Les orages les plus violents montent au-delà de la troposphère, soit 40 km... Cette altitude va dépendre de la stabilité de l'atmosphère. Elle est déterminée par les météorologies qui publient des émagrammes qui sont assez difficiles à comprendre. Certaines cartes publient des valeurs de CAPE qui est l'acronyme anglais de ce qui se dit en français énergie potentielle de convection disponible (restez concentrés sur nycthémérale...) qui permet de voir si l'atmosphère est favorable à la montée des particules réchauffées (je n'ai pas vérifié, mais je pense que Windy doit l'avoir car ces données sont disponibles sur les fichiers grib des principaux modèles de prévision).
Cette instabilité propice au déclenchement des thermiques se manifestera sur le terrain par l'apparition des cumulus sur terre. Plus ils se développent, plus le thermique sera puissant. Au contraire , l'absence de petits cumulus témoignera d'un thermique faible.
Donc pour prévoir l'intensité :
1) écart de température mer-terre
2) stabilité de l'atmosphère (soit sur une carte, ou en levant les yeux vers les cumulus)
3) force et direction du vent synoptique
Voilà, j'ai presque tout dit ce que je savais, en espérant ne pas avoir trop dit d'âneries, et en ayant l'impression d'avoir dépassé Michel dans ses efforts de concision